Le Mur de l'Atlantique. (Festung Europa)
Alors qu'en 1941, l'attention d'Adolf Hitler est concentré sur le front Est, en décembre les Américains entrent en guerre contre les forces de l'Axe (Allemagne, Italie et Japon), après la destruction d'une partie de leur flotte du Pacifique à Pearl Harbor par l'attaque surprise de l'aviation impériale nippone. Dès lors Hitler doit se battre sur deux fronts, les Russes d'un côté et les Anglo-américains de l'autre, et sent bien que lorsqu'ils seront prêt à passer à l'offensive celà se produira inévitablement sur les côtes atlantiques.
Par sa directive de guerre n°40 du 23 mars 1942, Adolf Hitler élabore toute une série de mesures pour renforcer les côtes des pays européens occupés ou anexés. Dans un premier temps seuls les grands ports sont puissament protégés, surtout ceux qui abritent les bases de sous-marins de la façade atlantique. Les Allemands sont convaincus qu'un débarquement n'est possible qu'à proximité d'un port pour assurer la logistique des troupes d'invasion. C'est dans cet esprit qu'est lancé la construction des bunkers qui doivent abriter les batteries lourdes et moyennes de la Kriegsmarine pour les objectifs marins, les points d'appui pour l'armée de terre et les pièces de la Luftwaffe qui doivent assurer la protection anti-aérienne de ces secteurs. Les travaux sont confiés à l'organisation Todt, le Reichsarbeitsdienst (service du travail du Reich) ainsi qu'aux unités du génie de l'armée. Au départ la main d'oeuvre est sur la base du volontariat, les Allemands ayant besoin d'une main d'oeuvre spécialisée, puis très vite des milliers de travailleurs forcés (prisonniers de guerre, 10 000 Juifs, jeunes Français voulant échapper au STO en Allemagne ou des républicains espagnols réfugiés en France ) sont mis à contribution pour édifier le mur sur les côtes néerlandaises, belges, françaises de la Mer du Nord, de la Manche et en Vendée ainsi que dans les îles Anglo-normandes. De plus, près de deux cent entreprises allemandes vont sous-traiter à quinze mille entreprises françaises, sociètés de BTP et cimenteries (grands groupes ou PME) vont collaborer à la réalisation des travaux et beaucoup auront à répondre de ces actes et des bénéfices engendrés lors des procès de l'épuration après la guerre.
Fraichement promu maréchal pour son action en Afrique Erwin Rommel se voit confier par Hitler la mission de l'inspection des fortifications du mur de l'Atlantique en décembre 1943. A partir de janvier 1944, il est nommé à la tête du groupe d'armée B chargé de la défense du Nord-Ouest de l'Europe et des Pays-Bas. Sa stratégie est de repousser un débarquement directement sur les plages. Son supérieur hiérarchique le maréchal Gerd von Rundstedt ne partage pas ce point de vue, pour lui des troupes armées et blindées placées en retrait des terres pourraient livrer bataille après le débarquement. Selon lui les Alliés ne pourraient combattre longtemps sans disposer d'un port, mais le Führer se range à l'avis de Rommel.
Le premier constat de Rommel est accablant, il trouve les défenses côtières inadaptées et insuffisantes. Il va immédiatement ordonner le renforcement des fortifications déjà existantes. Sous son impulsion, une ligne d'emplacements de tirs abritée par du béton renforcé est construite le long des plages et parfois même dans l'intérieur des terres, pour abriter des mitrailleuses, des mortiers et des armes anti-chars. De nombreux champs de mines et d'obstacles anti-chars sont placés sur les plages, ainsi que des obstacles piégés sont immergés juste à la limite de la marée, pour pouvoir couler les péniches de débarquement avant qu'elles ne puissent décharger des hommes ou des blindés. Au printemps 1944, les Allemands avaient déjà disposés plus de 6 millions de mines jusque dans les arrières des lignes de défenses et certaines routes côtières avaient également été piégées. Dans toutes les prairies ou tous les endroits suseptibles de voir atterrir des planeurs des grands pieux minés avaient été disposés, et certaines zones situées près des rivières ou d'estuaires sont innondées de façon permanente. Bien que la plupart des lacunes dont souffraient le mur de l'Atlantique, avaient été comblées, celui-ci n'offrait pas assez de profondeur et la seconde lignes de défenses placée plus en arrière du rivage est très incomplète faute de temps et de moyens. Rommel en était pleinement conscient.
Le 6 juin 1944, les troupes alliées attaquent la Forteresse Europe (Festung Europa) sur les cinq plages, assez loin d'un port, ayant retenu le désastre de Dieppe deux ans plus tôt. Hormis le secteur d'Omaha Beach et de quelques batteries à l'intérieur des terres les fortifications tombent assez rapidement. Cependant les Alliés seront de nouveau confrontés au mur de l'Atlantique pendant la capture du port de Cherbourg fin juin 1944, du Havre en septembre ainsi que lors de la bataille de l'Escaut en novembre 1944 pour libérer les accès maritimes au port d'Anvers. Entre juillet et septembre 1944, la sanglante bataille de Brest pousse les Alliés à ne pas s'attaquer aux autres forteresses des ports bretons où les Allemands se sont solidement retranchés ( Saint-Nazaire, Brest Lorient) sauf Saint-Malo qui tombe en août 1944, ni aux îles Anglo-Normandes libérées le 9 mai 1945, le lendemain de la capitulation allemande.
Nous pouvont observer cinq ensembles ditincts composant le mur de l'Atlantique:
* Les fortresses qui protègent les ports.
* Les batteries côtières.
* Les station radars et d'écoute.
* Les ouvrages de défenses rapprochées des plages.
* Les obstacles anti-débarquement des plages et anti-mouvement à l'arrière des défenses.
En ce qui concerne les troupes statiques qui défendent les fortifications sont de faible combativité, plus généralement des soldats déclarés inaptes au combat mobiles et beaucoup d'étrangers combattant sous l'uniforme allemand (Russes Roumains Hongrois, Polonais etc...). Seule la 352e division d'infanterie, qui défend le secteur d'Omaha beach reste d'une bonne valeur combative.
Sur les 500km des côtes normandes le mur de l'Atlantique comporte en juin 1944.
* 1 643 ouvrages bétonnés terminés.
* 79 en voie d'achèvement.
* 289 en cours de construction.
Aujourd'hui encore de nombreux bunkers et blockhaus sont toujours présents sur le tracé du Mur de l'Atlantique. Certains ont été restaurés ou abritent des musées, comme le Grand Blockhaus de Batz-sur-Mer ou la batterie Todt dans le Pas-de-Calais.Sur les côtes sablonneuses de nombreux bunker se sont affaissés. Une grande majorité de bunkers sont à l'abandon, très dégradés corrodés par le vent marin et les intempéries, largement tagués. Il y est très risqué voire dangeureux se s'y aventurer, certains sont utilisés par les services de déminage pour faire exploser des obus retrouvés sans risque de dommages des zones environnantes.
Le mur de l'Atlantique.
Treillis métallique destiné à la construction transporté par wagons en 1943. (Bundesarchiv).
Dans un tobrouk un guetteur scrutant l'horizon des côtes de Gironde. (Bundesarchiv).
Un emplacement pour un canon anti-char sur les côtes norvégiennes. (Bundesarchiv).
Batterie Lindemann dans le Pas-de -Calais. (Bundesarchiv).
Le feldmarechal Rommel en tournée d'inspection. (Bundesarchiv).
Photo impressionnante d'un canon à longue portée de la batterie Lindemann. (Bundesarchiv).
La batterie de Longues-sur-Mer qui conserve encore ses canons. (Photo Flash 112.).
Poste de direction de tir de la batterie de Longues-sur-Mer, placé en bordure de la falaise. (photo Bagradian).
Station radar allemande détruite près d'Arromanches-les-Bains.
Les batteries d'artillerie côtières allemandes en Normandie et leur portée de tir. (W. wolny).